Cathédrale de Chartres
Patrimoine

Le métier d’architecte du patrimoine

La généalogie, qui nous unit, est une quête passionnante de l’origine et de la filiation des familles à travers le temps. En étudiant le patrimoine immobilier de ces familles, nous pouvons mieux comprendre la vie de nos ancêtres. Dans cet article, je vous présente le métier d’architecte du patrimoine en partageant mon parcours professionnel. Nos bâtiments, témoins de l’histoire, jouent un rôle crucial dans notre héritage, il est essentiel de les entretenir pour les préserver pour les générations futures.

Études d’architecture

Le bac scientifique en poche, je n’avais pas d’idée particulière sur mon futur métier. Aimant dessiner, je réalise mes  études supérieures à l’école d’architecture de Paris-Malaquais. Au fur et à mesure, je découvre un métier complexe, mais passionnant. L’histoire de l’architecture fait partie des matières que j’affectionne le plus. Le long des six années de formation, je favorise les options et mes sujets  d’exercice, en rapport avec le patrimoine.

Je choisis comme sujet de diplôme : l’aménagement du viaduc de la Bastille à Paris.

Ce viaduc longe l’avenue Daumesnil à Paris 12ème. Il portait la ligne de chemin de fer de l’Est entre Bastille et Saint-Mandé depuis 1859. La ligne desservait ensuite le Sud-Est Parisien. Désaffecté un siècle plus tard, il est laissé à l’abandon. Mon projet, basé sur le programme de la ville de Paris concernait l’aménagement des espaces sous les arcades du viaduc, la création d’une promenade sur le dessus en favorisant la liaison entre les deux quartiers.

Je n’ai pas échappé à la traditionnelle « charrette » des architectes pour finir mon projet à temps. En l’occurrence, la charrette a été une Renault 4L. En effet, sur le chemin de l’école d’architecture, j’apportais encore mes dernières retouches à la maquette : j’étais charrette !

Après avoir présenté mon projet devant le jury, j’obtiens mon diplôme d’architecte DPLG. (Diplômée par le Gouvernement) en mars 1990.

Premières expériences professionnelles

Après quelques mois d’emplois intérimaires, je trouve un premier poste à Versailles, chez Mme Françoise ADAM-MOUTON, architecte du patrimoine , dont les bureaux étaient voisins de ceux de son mari, Benjamin MOUTON, Architecte en Chef des Monuments Historiques (ACMH).

Je l’assiste pour faire des relevés d’églises dans les départements des Yvelines et de l’Essonne. De retour à l’agence, je dessine sur ma table  à dessin les différents plans, coupes et élévations, à l’encre sur calque. Je réalise ainsi mes premières expériences dans le patrimoine.

J’intègre quelques mois après l’agence de Benjamin MOUTON.

les études préalables à travaux

En 1990, les ACMH s’occupent de la restauration des édifices classés parmi les Monuments Historiques dans les départements dont ils ont la charge. Des études préalables à travaux sont commandées, afin d’avoir une bonne gestion financière de la restauration des monuments.

Je participe alors à ces études globales comprenant des recherches historiques, le récolement des plans anciens, les relevés  sur site et le dessin des édifices.

Ensuite, les analyses structurelle et sanitaire sont réalisées, afin d’établir un programme de travaux chiffré par ordre d’urgence.

Le relevé

La première visite d’un édifice est toujours un moment émouvant.

La première étape, en particulier pour accéder aux combles d’une église, est de trouver la bonne clé ! Cela peut parfois prendre quelques minutes, mais il arrive que cela prenne des heures, car ces accès « techniques » ne sont pas souvent utilisés.

Une fois les accès ouverts, je fais personnellement un premier tour général pour mieux appréhender le travail à accomplir. Puis après s’être installé avec différents matériels de relevés, je commence à dessiner plan, élévation, coupe , détails… sur lesquels je reporte les côtes prises à la suite au mètre ruban ou au télémètre laser.

Le relevé permet d’examiner consciencieusement l’édifice, d’observer les différentes pathologies, d’analyser les différentes étapes de construction.

Comme pour un examen médical, un diagnostic est établi en fonction des différentes pathologies. Après avoir défini l’origine des désordres, on peut proposer les travaux de restauration par ordre d’urgence.

Il faut aussi cohabiter avec les pigeons qui envahissent parfois tellement les espaces de combles que les fientes s’accumulent et empêche d’ouvrir les portes !!! Le roucoulement devient le fond sonore de la journée !

Il faut être particulièrement vigilant et prudent dans la visite des combles, de ne pas marcher sur un plancher endommagé ou des voûtes instables. Les escaliers ou échelles d’accès peuvent être en mauvais état.

Il est préférable de ne pas avoir le vertige dans ce métier ! On circule parfois sur des cheminements en hauteur. On utilise également des nacelles pour examiner des parties inaccessibles. J’étais toujours partante pour y monter, mais peu rassurée lorsqu’une nacelle a refusé de redescendre!

Chaque sujet est particulier et riche d’enseignement, l’histoire des édifices et les techniques de construction étant propres à chaque territoire.

École de Chaillot

En 1991, j’intègre l’école de Chaillot afin de me spécialiser dans la restauration du patrimoine. La formation dure deux années, à raison de deux jours de cours tous les quinze jours à Paris au palais du Trocadéro. Je peux ainsi continuer à travailler en parallèle en agence et compléter mon expérience.

En 1993, j’obtiens mon Diplôme d’Etudes Supérieures de Conservation et d’Histoire des Monuments Anciens. Le titre usuel du métier est « architecte du patrimoine ».

En 1995, j’ai l’opportunité de me rapprocher de mon domicile en intégrant l’agence de Patrice CALVEL ACMH, à Brunoy (Essonne).

Je continue à réaliser des études préalables à travaux. Mon expérience se complète par la description des travaux et l’estimation de leurs coûts.

Je délaisse petit à petit et avec regret le dessin manuel et commence à dessiner sur ordinateur. La table à dessin se transforme en bureau.

Les chantiers de restauration

Assez rapidement, je me rends sur les chantiers pour contrôler le bon déroulement des travaux. Les échanges avec les entreprises spécialisées dans les Monuments Historiques sont très riches et permettent d’apprendre différentes techniques dans plusieurs corps de métier : maçonnerie, pierre de taille, sculpture, charpente, couverture, serrurerie, ferronnerie, menuiserie, vitrail, restauration de sculpture, restauration de décors peints…

Lors de visites de chantier, j’ai appris à marcher sur une toiture en tuiles canal et sur les lattis d’une couverture en tuiles plates ! Les réunions de chantier sont parfois complétées par des visites en atelier. Ces visites apportent une connaissance plus précise des modes d’exécution de chaque corps de métier.

Par exemple, l’examen des vitraux en atelier permet de les voir de près, en cours de nettoyage et de consolidation. Les résultats de restauration sont exceptionnels.

Certains projets de restauration sont réalisés en coordination avec des équipes d’archéologues. En amont du chantier en archéologie du bâti et fouilles, et en suivi de chantier en coordination avec l’architecte.  

J’ai eu le privilège de travailler sous la direction de Patrice CALVEL, sur la restauration de la cathédrale de Chartres, notamment la restauration de certaines façades, celle des enduits intérieurs du chœur XVIIIème et des ses vitraux du XIIIème siècle.

D’autres chantiers ont concerné des églises, des châteaux, un ancien prieuré, mais aussi un moulin, des ruines romaines…dans les départements du Tarn, Gers, Hautes-Pyrénées, Eure-et-Loir et Manche.

Au cours de ces années, j’ai suivi différentes formations, notamment sur le code des marchés publics, afin de maîtriser les procédures d’appels d’offres des entreprises et le suivi administratif des chantiers.

En 2013, Patrice CALVEL part à la retraite. Ces dix-huit années m’ont permise d’aborder l’ensemble des tâches de l’architecte.

Projets pluridisciplinaires

J’intègre à la suite l’agence de Pierre BORTOLUSSI, ACMH, à Fontenay-le-Fleury (Yvelines). Les projets dont j’ai eu la charge sont regroupés essentiellement sur Versailles et les départements de l’Eure et de l’ Oise.

Certains projets d’aménagement au sein de cette agence nécessitent la maîtrise de nouvelles connaissances.

Depuis quelques années, les règles d’hygiène, de sécurité et d’accessibilité dans les édifices anciens sont intégrés aux projets de restauration.

Les équipes de maîtrise d’œuvre deviennent de plus en plus pluridisciplinaires : bureau d’étude structure, bureau d’études fluides, acousticien, thermicien, muséographe…

Différentes technologies apportent des outils complémentaires à l’analyse les bâtiments telles que la photogrammétrie et le repérage par drone.

Les logiciels de dessin assisté par ordinateur sont de plus en plus performants permettant la visualisation des projets en 2D et 3D.

Il ne faut pas oublier que le métier bien que passionnant est très prenant et exigeant. Les déplacements sur site sont plus ou moins importants.

Modes d’exercice du métier

Le métier d’architecte et plus spécifiquement d’architecte du patrimoine est en  perpétuelle évolution.

L’architecte du patrimoine peut exercer en libéral ou en salarié dans une agence. Il peut accéder au concours d’architecte urbaniste de l’État – AUE ( anciennement architecte des bâtiments de France-ABF), et au concours d’architecte en chef des Monuments Historiques.

Remerciements

Le métier d’architecte patrimoine est passionnant.

J’ai eu la chance de travailler avec trois architectes en chef des monuments historiques qui m’ont apportée des connaissances différentes.

Je tiens à remercier tout particulièrement Patrice CALVEL dont la collaboration pendant une vingtaine d’années a été particulièrement enrichissante et conviviale.

J’adresse aussi mes remerciements chaleureux à l’ensemble de mes collègues : architectes, dessinateurs, secrétaires, économistes du bâtiment, soit une quarantaine de personnes en agence, dont le travail en équipe a été différent pour chaque projet.

Je salue certains bureaux d’études et économistes du bâtiment dont les échanges et la confiance commune ont été précieux.

La qualité de ces relations humaines a été un véritable moteur pour mon épanouissement professionnel.

Aujourd’hui, je retrouve une grande qualité relationnelle dans mon actuel métier de généalogiste familial que j’exerce également avec passion.

Merci à tous !

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